Aujourd’hui, une chronique dans laquelle Lydie Delanoue présente Eugène Farcot, inventeur de génie et figure eurélienne pourtant peu connue. Il fait l’objet de son nouveau livre : « Eugène Farcot, maître des horloges et des aérostats » ( éditions du Colombier, janvier 2023).
A Sainville, un petit musée méconnu
Il est, en Eure-et-Loir, un petit musée grandement méconnu, bien que labellisé « Musée de France » et logé dans un bâtiment remarquable, au centre d’un village du canton d’Auneau. Il s’agit du Musée Eugène Farcot de Sainville.
Eugène Farcot a dessiné et financé ce bâtiment. Ses collections et celles de son épouse, Pauline Le Blond, ont été installées au deuxième étage, conformément à leurs dispositions testamentaires datant de 1890 et 1899, mais pour quelles raisons ? Tout simplement parce qu’Eugène Farcot était né à Sainville en 1830, et que le bâtiment abritant son musée devait être érigé en lieu et place de la modeste maison de ses aïeux.
Les origines modestes d’Eugène Farcot
Son père était marchand-colporteur-volailler-beurrier ; sa mère lingère, mais sa tante s’est mariée à un officier retraité qui, décelant les dons du jeune Eugène, lui a donné des notions de dessin mécanique, avant de le placer chez un mécanicien de la capitale.
Dès lors, sa vie est devenue parisienne, même s’il a toujours gardé des liens avec sa terre natale. Lorsque la révolution de 1848 a éclaté, Eugène Farcot s’est rangé du côté des insurgés, ce qui lui a valu de passer plusieurs mois en prison.
Eugène Farcot : maître des horloges….
Entre 1850 et 1853, alors que la Savoie n’était pas encore française, il a été élève de l’École d’horlogerie de Cluses. Il s’est installé ensuite dans le XIe arrondissement de Paris, comme fabricant d’horlogerie. Ses créations de plus en plus complexes et imposantes l’ont amené à participer à quantité d’expositions, dont les Expositions universelles de Londres, de Paris et de Philadelphie. Nombre de médailles sont tombées dans son escarcelle. Napoléon III a fait de lui son horloger attitré.
…. et des aérostats
De même que Nadar dont il était l’ami, Eugène Farcot avait une autre passion beaucoup moins lucrative que l’horlogerie : la navigation aérienne. C’est ainsi que le 12 octobre 1870, en plein Siège de Paris par les Prussiens, et peu après Gambetta, il a quitté la place Saint-Pierre à bord d’un ballon chargé de courriers à destination de la province. Un colombophile l’accompagnait. Lorsqu’ils ont atterri en Belgique, tous deux étaient dans un triste état, de même que leurs pigeons. Farcot l’a raconté dans Voyage du ballon Le Louis-Blanc par son aéronaute E. Farcot, le second de ses principaux ouvrages.
Eugène Farcot, voyageur
Non seulement le natif de Sainville a beaucoup volé, mais il a aussi beaucoup voyagé : en Amérique, en Afrique, en Asie. Il en a rapporté quantité d’objets car il s’intéressait à tout. Son hyperactivité était telle que, s’en allant en cure à Aix, en juillet 1874, il a escaladé le Mont-Cenis, puis visité la région d’Annecy, au lieu de « prendre les bains ».
Eugène Farcot, bienfaiteur de sa commune
Cinq enfants sont nés de son mariage avec Pauline Le Blond. Seuls les deux aînés ont vécu, mais ils sont décédés avant leurs parents : Eugène en 1881, à l’âge de vingt ans ; Marguerite en 1890, dans sa trente-deuxième année. Le testament du papa a suivi de peu la mort de sa fille. Sa fortune le lui permettant, il y a prévu quantité de dons.
En plus d’un musée, son village d’origine disposerait d’un logement pour un médecin. L’horloge de la mairie et la pompe à eau de la rue de la Gare témoignent également de sa générosité à l’égard des Sainvillais. Il s’est éteint en 1896, dans une superbe demeure de Saint-Maur-des-Fossés. De même que sa famille et celle de son gendre et héritier, Henri Wandenberg, il repose au cimetière de Montparnasse, à Paris.
Le musée de Sainville à découvrir…
Depuis sa réhabilitation en 2016, le Musée Eugène Farcot s’honore de présenter de façon plus attrayante les collections de son bienfaiteur : des montres, des horloges, des portraits, des peintures, des objets de toutes époques et provenances, des correspondances et des récompenses, jusqu’au « modèle d’ensemble du navire aérien conçu et exécuté par Eugène Farcot horloger mécanicien », pour l’Exposition au Palais de l’Industrie, en 1863.
Vous l’aurez compris, la vie trépidante d’Eugène Farcot, ainsi que son ascension sociale des plus représentatives de la seconde moitié du XIXe siècle, méritaient amplement d’être retranscrites.
En savoir plus : « Eugène Farcot, le maître des horloges et des aérostats », Lydie Delanoue, Ed Le colombier, janvier 2023.